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La rupture, l’essence de l’art

La rupture est l’essence même de l’art moderne, notre quotidien est à l’origine de toute œuvre d’art contemporain. En déambulant sur le chantier du Garage, certaines formes, matières, éléments architecturaux mais aussi morceaux de fer, échantillons de papiers, restes d’emballage ou encore matériaux entreposés, empilements d’objets, traces de peinture, débris, poussières, évoquent déjà le futur univers de ce lieu, celui d’un espace dédié à l’art contemporain.

Là où certains reconnaîtrons ces signes, d’autres s’en offusqueront, d’autres encore resteront perplexes ? Quel parallèle peut-il y avoir entre ce chantier où l’on détruit des murs, coule du béton, décharge des briques, tire des câbles électriques et celui d’une œuvre d’art ? Comment cet espace encombré de chaises abandonnées, de tuyaux, à l’igarage brive 1ntérieur duquel stationne encore des véhicules comme ce chariot télescopique, peut-il nous conduire jusqu’à ne serait-ce que l’idée d’une exposition ?

La métamorphose de ce cube blanc est déjà le signe extérieur de futures perturbations, celles auxquelles seront confrontés notre regard, puis tous nos sens et notre pensée. Alors, en regardant autrement les images de ce chantier, nous en retenons ses lignes, ses courbes, ses angles saillants, ses multiples facettes.

 

L’échafaudage…

Nous prenons le temps, nous nous arrêtons sur un détail de cet échafaudage accolé à une verrière, nous le regardons sous l’angle de la géométrie et nous pensons…

Au cubisme et à la célèbre phrase de Cézanne : « Traitez la nature par le cylindre, la sphère, le cône, le tout mis en perspective soit que chaque côté d’un objet, d’un plan, se dirige vers un point central(…). », qui servira de source à ce mouvement initié par Pablo Picasso et Georges Braque.

La rythmique de ces lignes horizontales et verticales, l’abstraction qui s’en dégage, le tout couronné d’une petite dose d’imagination, nous fait cheminer jusqu’aux Demoiselles d’Avignon, le célèbre tableau de Picasso qui marque le point de départ de l’aventure cubiste en rompant avec l’art d’imitation.

Hérité des recherches de Cézanne, influencé par les arts primitifs, ce mouvement développé de 1907 à 1914, connaît plusieurs phases. D’abord Cézannienne et analytique, la représentation du monde est entièrement imaginée, le motif n’est plus perçu selon un seul point de vue.

 

Sur le sol du Garage…

garage brive 2

Un morceau de miroir brisé attire notre attention. Le visage du Garage prend l’allure d’un portrait taillé dans le cristal, nous pourrions penser à celui d’Ambroise Vollard[2].

Nous retenons la géométrisation des formes, leur fragmentation, leurs hachures, le système de facettes traitées en dégradés monochromes.

Ces valeurs peu contrastées, ces télescopages successifs donnent un rendu à la limite de la lisibilité et frôle l’abstraction. C’est à ce moment-là que l’esthétique du cubisme évolue jusqu’à l’introduction d’éléments réels, c’est le cubisme synthétique.

Avec Nature morte à la chaise cannée (1912) [3] , Pablo Picasso utilise un morceau de toile cirée pour sa valeur picturale. Ce fragment de réalité intégré à la toile ouvre la voie des papiers collés.

 

Ces valeurs peu contrastées, ces télescopages successifs donnent un rendu à la limite de la lisibilité et frôle l’abstraction.

C’est à ce moment-là que l’esthétique du cubisme évolue jusqu’à l’introduction d’éléments réels, c’est le cubisme synthétique.

 

 Sur un mur du Garage…

Ce morceau de tapisserie pourrait nous évoquer le découpage d’une forme, le collage d’un de ces tableaux mais ces formes rondes, ces couleurs vives nous renvoient finalement au style pictural de Robert Delaunay.

garage brive accueil

Influencés par le cubisme, comme un grand nombre des jeunes peintres de la génération des années 10, Robert Delaunay et sa femme, Sonia Delaunay développent l’Orphisme. Ce terme est utilisé par Guillaume Apollinaire pour désigner une œuvre marquée par des formes géométrisées où la couleur devient autonome.

Dans Rythme, Joie de vivre [4], les cercles concentriques évoquent des ondes colorées, rythment la toile simulent la vitesse. Les couleurs remplacent les objets, laissent la place à la lumière. Les formes rendent compte d’une diffraction, celle opérée par la lumière : « Rien d’horizontal ou de vertical, la lumière déforme tout, brise tout. »[5]

De la rupture à l’organisation du chaos, les portes du Garage s’entrouvrent…


[1] Pablo Picasso, Les demoiselles d’Avignon, 1907, huile sur toile, 243.9 x 233.7 cm, Musée d’art moderne, New-York.

[2] Pablo Picasso, Portrait d’Ambroise Vollard, huile sur toile, 93 x 66 cm, Musée Pouchkine, Moscou.

[3] Pablo Picasso, Nature morte à la chaise cannée, 1912, huile et toile cirée sur toile encadrée de corde, 29 x 37 cm, Musée Picasso, Paris.

[4] Robert Delaunay, Rythme, Joie de vivre, 1930, Huile sur toile, 200 x 228 cm, Centre Georges Pompidou, Paris.

[5] Robert Delaunay. Du cubisme à l’art abstrait, Paris, 1957, p.62.

Catégorie: art contemporain
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